mercredi 19 décembre 2012

291 - Lumière







mardi 18 décembre 2012
Ma fille malade s'est endormie sur moi ce matin. J'attends dans l'amour que j'ai pour elle. J'attends qu'elle ne meure pas avant moi - cette attente ne finira probablement pas avant que la vie en ait fini de moi, ou alors l'épreuve aura eu lieu.
Sur mon torse le petit être respire trop rapidement - et ça m'inquiète. Ses bronches crépitent comme un bois incendié dans un mauvais vent.










vendredi 17 septembre 2010
Ma fille est née le 24 août 2010 à 00h51.

J'ai lu Francis Ponge: La rage de l'expression, Le parti pris des choses, Proêmes, Le bois de pins, Le ciel provençal, La Seine... dans le Tome premier édité chez Gallimard que j'ai acheté il y a quelques années, sur une impulsion que je ne m'explique pas, avec les tickets cadeaux du Comité d'Etablissement. J'ai peu d'attrait pour ce poète.

la vitesse mortifère - surmoi - argent - peur de l'exclusion - fumer, trop - totalitarisme - toxicomanie - décadence - Serge Portelli, appel à la résistance - tristesse, gâchis - la génération - roman - psychanalyse - divan - éducation spécialisée - dysphasie - automne - Le lisseur de joint acrylique - Alice - Lucie - un peu moins - et - genèse - la faute menace l'homme à l'ouverture - jouer - devenir cet autre dont je n'ai pas idée aujourd'hui - que la vie me fasse et me lie - assumer d'être avec l'autre - opacité salutaire - écrire - JE - TU - peut-être peut être si - croire - la parole - canaille - raconter des histoires - de page en page - faire la vie - faire l'amour - durer mourir durer 
(fin du cinquième cahier)





mardi 18 décembre 2012  
Je regarde le pied de la table à langer, blanc, se prolonger dans son reflet ténu sur les lames du plancher. Je cherche la prolongation de cet instant dans le reflet de l'écriture. L'image du reflet sur le bois persistera bien au-delà de ce bois, de ce meuble. Il demeurera dans mon oubli dont ce que j'écris constitue le support.
Ma fille dort dans son souffle court, courageuse elle n'a pas fui son sommeil. Elle est sa propre écriture peut-être: son propre oubli - ce serait cela le génie de l'enfance : être oubli sans médiation?






Comment ne pas penser au fantôme, 
à ce rêve qui rêve l'homme ?

Le monde se prolonge dans les reflets où il se déverse, se perd, se disperse et 
joue à la ré-création.





- J'ai peur papa, j'ai peur du salon.





vendredi 30 septembre 2011
Les consistances fermes des meubles et des objets du salon m'interrogent. La lumière se reflète plus ou moins à leurs surfaces. C'est étrange. Ce silence appesanti, ce silence qui prend corps, qui se fige et pourtant dure plus dynamiquement qu'une voiture lancée à toute vitesse.

dimanche 22 février 2009
Une belle lumière émeut par son silence.

Comme le jour révèle la surface de la table, ce reflet patiné par des siècles de lumière.






Un reflet n'existerait pas vraiment. 
Mais il énoncerait quelque chose.
Il serait le signe d'autre chose que l'objet dont il est une image - ici ce pied de table- présente aveuglément.





...moi aussi je suis le signe d'autre chose que j'ignore la tragédie c'est que nul n'est à même de me le signifier une fois pour toute moi aussi je suis un reflet à la différence que la présence de l'objet pour moi est une absence moi aussi je suis un dédale de significations dans les couloirs ombreux duquel erre un monstre enfantin moi aussi je suis un lieu hanté par des histoires que personne ne connaît des histoires de trahison de lâcheté d'amour et de guerre moi aussi je suis issu du rêve d'un homme et d'une femme qui eux-mêmes étaient issus des rêves d'autres hommes et d'autres femmes moi aussi je suis l'image de ce que j'énonce sans le savoir...





autre chose:
le dire redondant
des disparus -
muet -
pullule dans les lumières 
quotidiennes











Samedi 28 juin 2011
Quand je passe du temps avec ma femme et ma fille, il me semble que je cède ma vie à l'oubli, à la mort qui ne cesse de dévaster nos histoires. C'est là, à vrai dire, une grande preuve d'amour, que d'accepter que la mort me dévaste sans lui opposer de résistance - c'est-à-dire que je n'écris pas.
On pourrait dire que Lucie est un contrepoint à la mort. Ce serait juste d'affirmer cela pour l'espèce humaine, considérant que dans le défilé des générations elle est momentanément un îlot de vie au coeur de l'océan des disparus. Mais je ne suis pas l'espèce humaine. Mais je suis une personne. Combien j'aime ma fille, cela, je l'affirme, combien j'aime ma fille: et cela ne se quantifie pas, ni ne se qualifie d'ailleurs, c'est au-delà, dans la vie même où organes peaux yeux se mêlent à l'amour et l'éthique. Pour autant ma fille ne peut pas constituer un fondement sur lequel m'appuyer pour lutter contre la mort, pour faire mien l'oubli qui nous est imposé par la force des choses. Ce serait confondre la vie et le sens de la vie. 










Aucun commentaire: